Chronique

À se ronger les ongles

Si vous n’avez pas éprouvé de frissons en regardant la victoire des Carabins hier, vous feriez mieux de voir votre médecin au plus vite.

J’ai beaucoup aimé le moment où les Marauders de l’Université McMaster allaient remporter le match avec un placement de dernière minute. Sur la ligne des Carabins se tenait le capitaine de la défense, Mathieu Girard, à sa cinquième et dernière saison au football universitaire.

Que pouvait-il bien se dire ?

Ça ne se passera pas comme ça ? Pas aujourd’hui ?

Toujours est-il qu’il a trouvé assez de forces pour se rendre au botteur et bloquer le ballon. Il a explosé à la ligne de départ…

Le gros bonhomme pleurait après le match, comme il le fait souvent et si facilement après une grande victoire.

On notera en passant que le football universitaire nous a offert un mois de novembre extraordinaire. Une série de matchs serrés, du bon football, de l’émotion…

Les gens qui ont à peu près rempli le stade Molson hier avaient raison, ça valait le déplacement.

Imaginez, plus de 22 000 personnes pour un match de sport étudiant.

Il y a parfois des choses qui nous réconcilient avec le monde du sport…

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On aurait dit que les astres s’étaient bien alignés pour cette journée inoubliable.

Dès la matinée, un flanc du mont Royal accueillait une immense et joyeuse marée bleue. Il faisait soleil, pas trop froid, la finale du football universitaire canadien était par hasard disputée à Montréal et les Bleus étaient parvenus à s’y rendre, après un passage obligé par Québec.

Un McMaster-Manitoba serait un peu passé inaperçu, avouons-le.

Des milliers de personnes étaient prêtes dès 10 heures, dans un parc emblématique de la ville, emblématique et protégé.

David Messier, de la direction des Alouettes, qui accueillaient l’événement : « C’est facile quand tout le monde collabore. La Ville nous a accordé la permission d’organiser un pique-nique et de dresser des kiosques sur un terrain où c’est interdit. On a fourni les barbecues… et quelle réponse du public… On va essayer de refaire tout ça. »

Au milieu de la foule, un groupe de costauds en coupe-vent des Carabins s’était réuni. C’était l’édition de 2002, la première de toutes, mais on voyait bien que la camaraderie est éternelle.

Michaël Nault, aujourd’hui 34 ans, était demi défensif…

« On avait tellement hâte de jouer que [l’entraîneur] Jacques Dussault avait tenu un entraînement à minuit le premier jour où il était permis de se réunir.

« On a perdu notre premier match par une cinquantaine de points contre Concordia. Au deuxième match, McGill nous a battus 57-3. Nous avons terminé la saison à 0-8, mais, deux ans plus tard, nous étions à 8-0.

« Nous sommes toujours demeurés proches des Carabins. Nous avons décerné une bourse à Mikhaïl Davidson cette année. »

Ne manquait qu’un bon match de football, ce que nous avons obtenu.

Puis une victoire des Carabins, qui n’a pas été facile et qui nous a fait nous ronger les ongles.

Les Marauders ont longtemps dominé la rencontre. Ils aiment leur image de bad boys de la Ville de l’acier, Hamilton. Ils ne portent jamais de veston-cravate dans les événements officiels, leurs entraîneurs non plus. Des survêtements et des cotons ouatés.

Ils sont un peu arrogants et très rudes sur le terrain. Ils se décrivent comme « la mauvaise odeur qui refuse de s’en aller et qui finit par vous avoir à l’usure »...

Ils ne nous ont pas eus hier, mais presque.

20-19, tout de même…

Quelle aventure.

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